[Dimanche 30 juillet #12 - Marécages]

Dimanche 30 juillet, C…



Je suis allée en ville hier, je suis revenue rincée. Je ne sais même pas quoi ajouter à ça : je suis rincée. Simplement voir tous ces gens ramassés au même endroit m’épuise et me submerge. J’aimerais tant de choses qui m’échappent à cause du manque de sommeil– une vie sociale satisfaisante, la capacité de faire quelque chose sans en payer le prix le lendemain. Comment, dans ces conditions, nourrir une vie un tant soit peu créative ? Je n’y arrive pas ; sortir de mes routines me fout par terre. Me souvenir du projet : aller investiguer le sujet santé mentale avec une professionnelle, bientôt.


Ma maison est une espèce de port d’attache dont j’ai vraiment besoin.


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Je déborde d’idées d’écriture – mais pas moyen de les prendre à bras le corps ; je barbote dans mon marécage.

J’aimerais écrire des nouvelles, j’aimerais entraîner mon écriture, muscler le sujet ; j’ai cette impression de ne pas être capable d’écrire si je n’ai pas trois jours complètement libres devant moi – ce qui arrive rarement, finalement – ce serait bien que j’inverse un peu la vapeur. Peut-être qu’aujourd’hui, entre les projets de rangement et d’activités avec S., je pourrais essayer d’écrire autre chose que ce journal.


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Elle s’est levée vers dix heures et demie, le visage encore plissé de sommeil, et m’a demandé si je pouvais fermer l’un des volets de la cuisine – trop de lumière pour ses petits yeux. J’étais déjà dehors quand elle a précisé, de loin : c’est pas grave s’il y a des chauve-souris derrière le volet – l’espace d’un éclair je me suis demandé si elle me disait de ne pas faire attention aux chauve-souris – c’était précisément l’inverse – elle a ajouté, comme si elle m’avait entendue penser : je veux dire que s’il y a des chauve-souris, tu ne fermes pas le volet, hein.


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J’ai regardé : chambre d’hôtel. Dans les romans, parfois, les protagonistes prennent la route et s'arrêtent dans des hôtels de campagne ; ça me fait envie. Ça coûte un bras, de s’extraire du quotidien, une nuit ; mais ne serait-ce qu’avoir regardé m’a fait du bien.


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[Été 2023 - Journal de bord, fragments]


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