[Lundi 31 juillet #13 - Droit dans l'oeil]

Lundi 31 juillet, C…



J’ai dormi. Un peu mieux. Il est huit heures du matin, ça fait deux heures que je suis debout, je profite du temps silencieux dans la maison ; j’ai lu un article sur l’écopoétique – ce sujet qui va être central dans ma vie étudiante à partir de septembre – je lis sourcils froncés, j’essaie de tout comprendre. Parfois je me perds, j’avoue, mais je sens que ça vient tressauter de joie dedans : je suis au bon endroit. Je crois que ce que j’écris, depuis plusieurs années, vient s’inscrire dans ce champ-là, et c’est enthousiasmant d’envisager comprendre mieux ce que je fais ; de mettre des mots dessus ; de l’inscrire dans un territoire.


Ça me fait penser, toutes proportions gardées, à ce que j’ai pu ressentir quand, l’année dernière, ma médecin a prononcé le mot trouble anxieux : ça m’a tranquillisée de constater que ce que je décrivais était connu, étudié, reconnu, que ça existait – que j’existais, donc – Que suis-je en train d’écrire ? C’est un peu énorme de formuler ça ainsi, dès patron-jaquet : j’existe parce que ce que je vis est connu du reste du monde sensé ; du monde que je vois comme sensé, quand moi, à mes propres yeux, je ne serais – donc – qu’insensée ; ou, plutôt qu’insensée, simplement pas suffisamment crédible ou en mesure de ressentir des émotions valides, ou « validables ». A mes propres yeux, again.


Rencontre impromptue avec mon manque d’estime de moi, tiens donc, salut ; j’ai l’impression d’avoir saisi l’occasion inespérée de le regarder droit dans l’œil en le croisant dans une ruelle alors qu’il ne se méfiait pas des passants – ça a du bon, d’écrire à l’aube.

 

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[Été 2023 - Journal de bord, fragments]

 

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