[Mercredi 30 août #22 - Ralentir, encore]

Mercredi 30 août, C…,



Je me lève tôt ces jours-ci, et je commence la journée en lisant ; en lisant en anglais un roman de Sara Baume, autrice irlandaise dont j’ai entendu parler tout récemment, quelques jours avant de partir en voyage en Irlande – précisément dans le comté où elle vit. J’ai acheté son dernier roman à Cork, et depuis je m’applique à en lire quelques pages tous les matins, quand j’ai l’esprit encore assez aiguisé pour comprendre au mieux, même si ma lecture reste laborieuse. Et puis au bout de quelques pages, je le pose et prends un autre livre, en français. Ces derniers temps, j’éprouve le besoin de lire de façon presque compulsive – j’ai laissé tomber, pour les vacances au moins, mes grandes idées de lecture avec un crayon à la main ; je lis, je m’empiffre. Nuala O’Faolain, Maggie O’Farrell, Jean Hegland, Annie Dillard ; après certains livres, j’ai besoin d’une pause, un peu – après Assez de bleu dans le ciel, que j’ai adoré, Dans la forêt m’a semblé fade au premier abord (et puis j’ai persévéré, et avec bonheur) ; j’ai même ressenti des montées d’adrénaline durant ma lecture, comme devant certains films avec du suspense – parfois j’ai ralenti mon débit de lecture parce que j’avais peur de ce qui allait suivre – c’est rare que je ressente ça. J’ai ouvert Pélerinage à Tinker Creek ce matin, après avoir terminé Dans la forêt hier soir, et je sens que c’est une lecture qui va me demander d’aller moins vite.

Et j’aime qu’elle me demande de ralentir.


Nous sommes revenus il y a presque une semaine d’une semaine en Irlande, avec quelques livres, des cailloux, des images et des sacs pas encore tout à fait défaits. J’ai pris des notes à la volée lorsqu’on est revenus ici, dans le petit carnet qui a servi de carnet de voyage familial durant la semaine (S. et E. y ont écrit et dessiné, moi j’ai fait des compte-rendus journaliers exhaustifs, X. a fait des dessins). Je crois que j’aimerais parler de déplacement, de maison, de bouquet de fleurs, d’un petit chien, des silènes ; d’eau froide, de l’odeur de la lessive, d’un if au milieu d’un cloître, de mon genou grinçant. Du moment inattendu et doux que j’ai passé sur le pont du ferry, quand les trois autres s’installaient dans notre carré réservé où on allait dormir par terre ; je crois aussi que peut-être j’ai envie d’attendre avant d’écrire, finalement, de faire ralentir le processus, comme certains livres me font ralentir ma lecture. Slow down, ils disaient. Rien ne presse.



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