[Vendredi 8 septembre #3 - Zone de manoeuvre]

Vendredi 8 septembre, C…



La semaine prend fin (prend feu). La rentrée est encore plus ou moins en cours ; le cap des réunions professionnelles stressantes est dépassé, les eaux sont encore troubles mais vont se calmer (j’espère). Les enfants commencent à avoir quelques repères – je pense surtout à S., qui fait sa rentrée en 6ème. Je vais avoir un peu d’espace (j’espère…) pour négocier l’autre rentrée : la mienne, ma rentrée en Master d’écriture.


Les inscriptions diverses sont effectives depuis cet été (rien n’a été très simple) ; j’ai une réunion de rentrée tout à l’heure, en visio (tous les enseignements sont organisés à distance) ; et hier, sur la plate-forme en ligne, les premiers cours sont arrivés. J’ai ouvert des yeux comme des soucoupes pendant quelques heures, le temps que je comprenne le fonctionnement des outils numériques (quand je stresse, mon cerveau s’éteint), en marmonnant que je ne savais pas où j’avais mis les pieds ; et quand j’ai saisi l’exigence et la haute volée des premiers documents qui ont été postés (et il va rapidement y en avoir beaucoup d’autres), là, j’ai pâli. Je suis sûre que j’ai pâli.


J’ai eu peur et l’envie de me désengager fissa de ce qui m’est apparu, sur le moment, comme une erreur d’aiguillage, m’a traversé. J’ai peur, pour de vrai ; peur de m’exposer, de ne rien comprendre, d’être le cheveu sur la soupe, la fille bizarre qui s’est trompée de direction, d’être celle qui n’est pas intelligente, ou pas intelligente comme il faut, de bégayer, de rire nerveusement, d’être trop silencieuse, de me sentir à part, inutile, bête, à côté de mes pompes, en retard, hors-sujet – et pourtant : me souvenir que l’entrée dans ce master était soumise à sélection, et que je ne suis pas là par hasard.


*


La réunion a été rassurante. Je n’en reviens pas encore de la somme de travail qui va être nécessaire ; j’ai l’impression d’être au pied d’une montagne. J’en ai parlé avec X., qui, de son côté, continue de faucher le jardin avec soin, le matin au lever du jour pour éviter le cagnard, au rythme de son propre pas, avec patience – ça sera pareil pour moi, je crois. La stratégie sera sans doute : m’emparer d’un cours, et y avancer à l’œil, sans m’éreinter la vue à tenter de distinguer la ligne d’arrivée. Comment faire autrement ?


*


J’ai pris la décision que je repoussais depuis quelques jours : j’ai envoyé un message à une thérapeute ; je crois que, ces prochains mois, je vais avoir besoin de me ménager des zones de manœuvre.


*


On a passé la soirée avec S. à regarder le soir tomber, confortablement allongé-es dans nos chaises longues ; on a regardé apparaître le Triangle de l’été, la Voie lactée, vu passer plusieurs étoiles filantes en papotant doucement. 

La nuit fut douce.



Commentaires