[Ateliers d'écriture - Coulisses]

J'aime bien prendre un peu d'espace pour observer ce que je fais, souvent, y réfléchir, poser des mots sur ce qui soutient mes intentions et comment en parler de façon juste et nuancée, si possible. Ici, des bribes de réflexions, des tentatives d'explication. Des traces.

 


 Atelier du 28 avril 2022

Mes marottes : écrire depuis les images qu'on a dedans, en soi, celles qui font nos mythologies singulières ; alors j'aime bien proposer un retour au calme et aux ressentis corporels. Écrire à partir de déclencheurs, oui, mais pas seulement.

Du temps pour atterrir, des extraits de textes littéraires pour atterrir encore plus et gratter un exercice d'échauffement, une proposition d'écriture en silence durant un temps donné, la possibilité ensuite d'en faire une lecture à voix haute. Faire attention au cadre, au sentiment de sécurité des participant-es et et au mien, prendre soin de mon système nerveux.


Atelier du 3 mai 2022

J'ai animé un atelier d'écriture ce matin ; nous n'étions que trois (l'inconfort des désistements de dernière minute), j'aurais pu le suspendre ou le reporter mais j'ai choisi de l'animer quand même – j'en avais envie. J'avais envie de cette possibilité que je me donne à moi-même en la proposant à d'autres ; parce que, si j'écris pourtant assez régulièrement, je constate que je n'écris jamais comme j'écris en atelier. J'aime comment les sujets et les images rebondissent et se font écho, comment chaque mot peut être la porte ouverte à des tas d'histoires et qu'on peut choisir de pousser les portes qu'on veut, comment la peur de perdre nos mots permet peut-être l'opportunité d'en glaner d'autres.

J'aime comment on parle de nous sans trop y toucher, comment des « je » se font entendre, comment on s'autorise à laisser entrer des mots en soi et à les digérer ; comment parler de puzzles et d'enfances en haut des arbres nous amène à partager des pans de soi, des références artistiques et littéraires et à se demander ce que les humains d'il y a 20 000 ans se racontaient à la lueur de leurs torches en genévrier.

J'aime aussi l'idée que ces espaces d'écriture viennent rencontrer des espaces de soi, des espaces dans le corps – et explorer, peut-être maladroitement mais avec beaucoup de curiosité, comment on peut écrire depuis un corps qu'on pose – que se passe-t-il quand on prend le temps d'arriver, quand on se donne de l'espace juste pour expérimenter de la lenteur – parfois on me dit que ce que je propose avant d'écrire, c'est de la méditation, mais je ne suis pas sûre du terme ; le mot guidance est apparu aussi, et c'est vrai que je guide le moment, mais le mot me semble rattaché à des pratiques plus ou moins spirituelles et ça n'est pas l'objet de ce que j'ai envie de proposer – ou alors la dimension spirituelle arrive par surcroît et c'est la surprise de l'inattendu peut-être. J'avoue ne pas savoir vraiment comment nommer ce moment-là, moi, je parle parfois de « descente dans le corps » parce que j'aime l'idée d'être dans le matériau, la matière, le tangible, l'anatomique, mais ça n'est pas très clair non plus.

Je crois que l'idée de prendre soin du système nerveux – avec beaucoup de simplicité, et sans doute je ne fais qu'effleurer le sujet - est encore la façon la plus juste de parler de ce que j'ai envie de donner à expérimenter.

Nous pensons, parlons, réfléchissons, marchons, éprouvons parce que nous sommes des systèmes nerveux – entre autres – et faire de l'espace pour se mettre au service de ce système (c'est-à-dire, il me semble, nous autoriser à ralentir, même si le processus vient chercher beaucoup de résistances, y compris chez moi qui prétends aller dans cette direction) crée quelque chose, une attention à soi, à l'autre, à ce qui nous traverse, à ce que nous éprouvons, à ce qui nous éprouve (quelle que soit la forme et la force de ce qui nous traverse) qui peut-être permet d'écrire depuis une autre place que celle que nous occupons au quotidien – c'est peut-être simplement pour ça que je ressens mon écriture différente quand je me laisse écrire dans mes propres ateliers, qui sait.


Juin 2022 - En parler, encore

J'aime bien faire du lien avec le corps, alors je propose un moment pour revenir vers les ressentis, les sensations, on écrit depuis un corps alors tant qu'à faire autant ne pas l'oublier sur le bord du chemin. Je m'appuie sur des extraits de mes lectures, je propose des déclencheurs, des petits bouts de phrases dont on peut se saisir pour mettre en route sa propre écriture, on écrit en silence ensuite pendant une quinzaine de minutes.

Il ne s'agit pas d'écrire des histoires – quoique, si des histoires s'invitent, elles sont bienvenues – ou alors si, des histoires de soi. Il ne s'agit pas non plus d'apprendre à écrire ou à corriger notre orthographe. J'aime parler d'écriture de soi. On se saisit d'un fil et on laisse se dérouler nos pelotes intérieures, nos imaginaires. De quoi ça parle, dedans soi, quand on tend l'oreille ?

 

Écouter les textes de l'autre ; diriger l'écoute, l'attention. Se proposer, à soi, d'être rencontré ou touché. Quels mots résonnent, comment ils résonnent ? Quelle image s'impose derrière mon regard ? Comment dire autrement que "c'est  beau" ; mettre les mots des autres au travail, mettre notre écoute en selle. Faire un retour à l'autre en évitant l'écueil de juger - même en disant "c'est beau", nous posons un jugement, nous envisageons que puisse être dit "ce n'est pas beau" - alors comment dire autrement, depuis notre "je", ce qui se passe quand on écoute.

Ne rien dire, aussi, s'autoriser à ne pas dire ce qui se passe, ou ce qui ne se passe pas, la sensation de ne pas être rencontré peut-être, pourquoi pas.

 

Not finished

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Crédit photo / dessin : I.G.

Commentaires

  1. Ces deux derniers paragraphes résonnent tout particulièrement pour moi : vastes et amples questions aux côtés desquelles cheminer longuement... C'est bien de te lire ! (ou beau ;))

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    1. Merci Amélie :) J'aime tellement ces questionnements qui n'appellent pas nécessairement de réponses claires ou absolues...

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