{2019 - Chronique de l'année et du jardin}
2019 - Plus que deux jours avant janvier, et
cette envie d'en profiter pleinement, de ces deux jours, doucement,
sans rien faire de précis à leur sujet, en me laissant digérer
encore cette année qui vient de s'écouler – et ne pas me projeter
trop rapidement dans l'année à venir. Elle arrive, aucun doute
là-dessus - pas besoin de courir à sa rencontre...
Je ne suis pas "femme de
bilans". Je suis plutôt du genre, finalement – et cela m'étonne presque de
le constater – à regarder le temps passer et à me laisser porter
par ses courants ; mais plusieurs invitations* à se poser pour
examiner l'année passée avant d'embrayer sur la suivante m'ont
rendue curieuse : ça ferait quoi, de regarder un peu à quoi
cette année a ressemblé ?
J'ai regardé. Et... ça fait beaucoup.
Oui, j'ai
toujours ce sentiment étrange que janvier dernier, c'était hier –
mais dérouler l'année, mois par mois, plusieurs fois selon des
angles de vue divers, en suivant le fil des souvenirs, des
sensations, ça m'a fait un truc inattendu. Ça m'a fait prendre
conscience d'un truc important pour moi : le temps est vaste.
Comment l'exprimer autrement ?
Le temps est vaste.
Certes,
janvier dernier, c'était hier ; mais cet hier peut se déplier,
se déployer, se déchiffonner, s'ouvrir. Hier
contient des tiroirs secrets, des chemins de traverse, des déserts
et des creux, des endroits noirs de monde, hier contient des plis et
des replis, des gouffres et des crevasses et des montagnes très
hautes, et parcourir ces chemins-là me montre que, certes, janvier
dernier, c'était hier, mais depuis cet hier, une vie ou plusieurs
vies se sont écoulées. Le temps est vaste.
Tous les angles de vue sont possibles
pour explorer le temps.
Nos actions. Ce qu'on a fait. Ce qu'on
n'a pas fait. Les pays rencontrés, les sols qu'on a foulés. Les
personnes rencontrées. Les décisions prises ou pas prises. Les
prises de conscience, via tous les prismes possibles :
féminines, féministes, politiques, familiales, écologiques - ;
les saisons traversées. Les mots dits ou les mots pas dits. La
santé. L'entreprenariat, le côté professionnel, le côté personnel, le côté social.
...et puis, un aspect qui s'est imposé
à moi tout doucement hier : le temps de mon jardin.
Mon jardin,
il est petit, il n'est pas parfait, mais depuis quelques années, je le
considère comme un fidèle reflet de ce qui se passe en moi. Et ça
ressemble à quoi, un jardin qui se déroule au fil des saisons ?
A un chapelet, un collier, un miroir avec des couleurs qui
foisonnent. On dirait presque un conte. Avec des fées, qui sait, qui
se penchent dessus et soufflent leurs graines au fil de leurs
caprices – ou des miens...
Décembre – Du jardin de ma mère, je
rapporte des bleuets, des giroflées, quelques iris, de la pervenche
et deux althéas.
Novembre – Le chrysanthème-mystère
planté en janvier dernier sans que j'en connaisse la couleur s'est
révélé. Jaune-saumon. Magnifique.
Octobre – Les vendangeuses – les
asters ! - font des feux d'artifice. Et j'ai fabriqué pour la
première fois un vinaigre de toilette avec des plantes sèches que
j'ai récoltées durant l'année.
Septembre – Ré-apparition surprise
des soucis (calendula...) ! Ils ont quasiment disparu une saison
entière, et je sens qu'ils vont coloniser le terrain l'an prochain
(et je m'en réjouis d'avance). J'ai planté quelques bulbes de jacinthe avec ma petite. Et confection d'un bouquet sec d'équinoxe,
qui trônera sur le rebord de la fenêtre de la cuisine pendant
plusieurs semaines.
Août – Récoltes et séchage :
sauge, romarin, thym, hysope, lavande. J'ai récupéré, dans un
jardin que j'aime beaucoup, un pied de saponaire ; il semble s'être bien acclimaté.
Juillet – J'ai planté les boutures
de romarin faites en février – un coup de tête, ces boutures !
Et perplexité : d'où vient ce plant de pétunia au beau
milieu de mes essais de tomates ? Je n'en saurai jamais rien...
mais je le bichonne.
Juin – En partant d'Espagne – où
j'ai suivi ma formation de thérapeute, que je poursuis cette année
-, après avoir reçu ma certification, je jette dans la mer un brin
de jonquille séchée qui trône sur le tableau de bord de ma voiture
depuis plusieurs mois. Une vieille femme de ma connaissance m'offre
un bouquet de roses de son jardin, en me disant qu'elles viennent des
rosiers de sa grand'mère.
Mai – Je suis femme-herbe, Ophélie
terrestre, je savoure le temps allongée dans mon jardin. Une amie
chère m'offre un pied de fougère mis en pot par ses soins.
Avril – Voyage en Irlande. Bouquet
sec, sur une table dans un pub ; retour à ma terre.
Mars – Étonnamment, ma mémoire
achoppe à cet endroit...
Février – Je fais des boutures "à la sauvage" de romarin et de sauge. Mon amie R., pas vue
depuis longtemps, m'offre la première jonquille de son jardin.
Janvier – Je repars du jardin de ma
mère avec un chrysanthème à la couleur mystère - ravie de
ne pas savoir à quoi il ressemblera.
...un angle de vue, juste un angle de vue. Un regard, le mien. Et
le vôtre ?
Isabelle
* Propositions de Manon Lavoie, coach en créativité (au Québec) - Camille Sfez, facilitatrice de cercles de femmes (France)
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A lire aussi sur ce blog :
{Espace du dedans - La forêt ancestrale}
Reclaiming the body, feeding my soul (en français)
Notes de voyage #3 - Bastion et reconquête
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Crédit photo : I.G. Mon jardin...
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