{Bribes - Décembre 2021]
J'ai drastiquement diminué mon temps de présence sur les réseaux, ces dernières semaines – ça s'est pas vraiment décidé, ça se fait tout seul et c'est un peu étrange à observer. Je récupère du temps de cerveau, ça fait du bien – marrant, ça fait tout pareil que dans ma boîte mail que je suis en train, peu à peu, de trier et de vider – je récupère de la place. Pour rien, la place, pour l'instant, et je revendique radicalement ce pour rien - ne pas remplir les interstices de vide et de temps libre, j'apprends.
Rester légère.
[Reminders - Puzzle
pieces]
S'enfoncer dans la forêt
Une autre
route
Pousser la porte
...
Je suis tombée tout à
l'heure sur un carnet de notes que j'ai utilisé durant ma formation
de thérapeute – il n'y a pas si longtemps que je l'ai terminée –
deux ou trois ans. Des notes prises à la va-vite en franglais mal
digéré - mélange de cours, de poésie de Mary Oliver, de traces
d'exercices de yoga - et surtout d'états d'âme saisis au vol
retrouvés tels quels, comme des fleurs mises à sécher entre les
pages d'un livre – je les retrouve toujours vigoureux narquois et
pleins de sève, prêts à me sauter à la tronche, encore.
...
Chercher encore et encore là où c'est vivant
Je ne peux pas
éviter ma propre présence
Coming back home
Digestion
et feuilles qui tombent
...
Je me retrouve face à mon
intransigeance, à ce que je veux ce que je ne veux pas ce que je ne
veux plus, à ce que je ne sais pas encore formuler, à ce que j'ai
déjà formulé et que j'ai pourtant oublié, à ce qui m'a déjà
été dit et que je reçois - de nouveau. Être formée pour être
thérapeute, ne pas savoir si je le suis si je veux l'être à quoi
ça rime cette affaire, juste vivre n'est pas suffisant... ?
Laisser
tout le matériau traversé s'ordonner de lui-même, ne pas être
trop pressée. C'est le chaos, d'accord ; juste tenter d'y
consentir.
...
Let me be enough
Don't leave
me
Pouvez-vous m'aider, même si j'ignore pour quoi j'ai
besoin d'aide
Impact
Be here, be there – both
Je
suis perdue
Je suis ma propre perte
Laisser mijoter
Dilemma :
connecting loss to join life
Yes to what I feel
On ne peut
jamais savoir
Territoire inconnu sans carte
J'en ai assez qu'il
m'impressionne
Juste grandir
Traquer la joie – rejoindre la
vie
...
elle ressort à l'air libre
c'est
une clairière avec une fontaine
un banc de pierre usé par le
temps
une de ces évocations médiévales le soleil qui passe à
travers les feuilles - elle est bien vivante
elle respire silencieuse
peut-être qu'elle est l'eau qui sourd
de la terre aussi et puis l'air à peine tiède
rien de plus à
faire à dire juste y être regarder
et puis se mettre à marcher le long de la rivière
----------
Ce truc lourd le brouillard
en fait
est fait de gouttelettes
d'eau si légère
qu'elles ne tombent
pas
elles ne tombent pas
Comme ça elle a l'air de rien, mais
sur la rive, là, c'est la barge d'Avalon, et l'eau c'est celle qu'on
doit traverser quand les brumes se lèvent pour atteindre - atteindre
quoi précisément, on sait pas trop, sans doute un monde qui
ressemble au nôtre mais avec juste ce qu'il faut de pas nommable
pour être un peu différent. Un truc dans la densité de l'air,
peut-être - juste un peu plus léger.
...c'est ce que je me disais, les mauvais jours ; les bons, je souriais et regardais le ciel.
-----
A lire aussi
[Fil de trame - Novembre 2021]
[Vivant-e-s ! Infolettre poétique]
-----
Crédit photographique : Isabelle Guérin
Commentaires
Enregistrer un commentaire