Irlande#2 - J'y retourne, les gars... - I am coming back there, guys...
Irlande#2
– Avant le voyage – J'y retourne, les gars...
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| Dublin - Lever du soleil sur la Liffey |
{In english below}
Je carbure à
l'émotion forte. A l'intensité, aux raz de marée d'émotions
échevelées et aux sauts dans le vide. Je suis verte de peur en
permanence – je veux dire, je crois qu'il n'y pas moyen d'être
plus trouillarde de la vie que moi. Rien ne me semble acquis, tout me
paraît menaçant, exotique, potentiellement vecteur de danger
mortel. La vie est pour moi un vaste champ d'expérimentation, à
chaque heure du jour – voire de la nuit. Épuisant. Mais quand ça
se calme, je me lamente et j'en redemande – ce ne serait pas la
définition de l'addiction ? De l'émotion par intraveineuse,
s'il vous plaît !
{En guise d'introduction : Irlande#1 - Le voyage antérieur}
J'ai acheté mes billets d'avion pour l'Irlande.
Et après ça, je me suis replongée avec un peu d'appréhension dans mes journaux intimes d'adolescente survoltée - je ne crois pas que c'est ce qu'on aurait dit de moi à l'époque face à cette fille rêche et timide, mais de l'intérieur, je peux vous le dire : c'était du 10 000 volts -, et j'en crois à peine mes yeux... tout est déjà là.
Tout.
Intact.
Les rêves,
les peurs, l'enthousiasme, tout. Jusqu'au sens de la formule.
A l'âge de seize ans, après un court
voyage en Irlande avec mon école de musique de l'époque, j'ai écrit
précisément ceci : je reviens d'Irlande, et je pleure.
L'Irlande.
Elle m'appelait déjà
avant ce premier voyage – et elle continue de m'appeler.
Je sens de façon très
aiguë que j'ai laissé quelque chose de moi tout chaud et vivant
là-bas, et, figurez-vous, je vais aller le récupérer.
J'en ai besoin, là, tout
de suite. Il semble que ce soit un élément essentiel de mon
existence, un truc dont l'importance m'échappe mais sans lequel mes
rouages ne tournent pas rond. Du lourd, à ce qu'il paraît.
Dans les années qui ont
suivi ce voyage adolescent, j'ai aussi écrit ceci : j'ai posé
ma vie sur une table et je l'ai oubliée en partant – quelle
étourderie.
J'y retourne, les gars.
Plus de dix-sept ans après,
j'y retourne.
J'y retourne, en solo,
Eastpack au dos, la larme à l’œil, l'émotion fracassée,
terrifiée (bien sûr !), haletante, confiante, debout, exaltée,
prête pour la déception, pour l'amour de moi retrouvé, et pour
tout le reste auquel je ne m'attends pas.
Les chances de ne pas
retrouver précisément ce que j'ai laissé tomber par inadvertance
là-bas sont plutôt élevées, je le sais ; alors je mise sur
tout ce que je vais récolter d'inattendu pour combler le déficit.
Je suis prête, les gars.
Je me suis mise en route,
en mouvement, le balancier se balance au rythme de mon pauvre cœur
qui fait des embardées, le temps s'est remis à couler et l'urgence
de vivre s'est mise à hurler.
J'y vais.
J'avance.
J'ai peur et j'y vais, ce
n'est pas demain, ce n'est plus hier. Je mets un pied sur ma route et
la route me happe. J'avais beau m'y attendre, j'encaisse le choc.
Vivre sans carapace après
avoir endossé si longtemps une armure en acier, ça fait mal, un
peu. La route, ça râpe. Le vent, ça cingle.
Et la vie appelle.
*****
Photo : IG
*****
A lire aussi :
La Gardienne de l'Ouest
*****
{English version}
Isabelle
And more...:
Ireland#1 - The earlier travel
*****
{English version}
Ireland#2 – Before travelling – I
am coming back there, guys...
I nourrish myself with thrills and deep
emotions. With intensity, with emotionnal tsunamis, with jumps in the
void. I am afraid of everything all the time – I mean, I think
anybody can be more afraid of life than me. Nothing seems to me
given, everything seems to me threatening, potentially a fatal risk.
Life is for me a vast experimentation field at every time of the day
– and of the night. Exhausting. But when it is getting calmer, I
want more of this – would'nt it be an addiction ? Emotion in
intravenous, please... !
I have just bought my airline tickets.
And then, I dived, a bit impressed, in
my diaries of my high-energy-adolescence – I don't think that
people saw me at this time as a high-volted one, but from inside,
trust me, that was the case – and... everything is already here.
Everything. Intact. Dreams, fears,
enthusiasm.
At 16, after a short trip in Ireland
with my music school, I wrote exactly this : I am coming back
from Ireland, and I am crying.
Ireland.
She was already calling me before this
first trip – and she still is calling me.
I feel in a very accurate way that I
have left something of me there, something very alive, and, you know what,
I am going to recover it.
I need it, now.
It seems that it is something essential
for me, something with a high importance even if I don't really know
what it is but if I don't have it, my life can't work perfectly.
Something very important.
During the years after this first trip,
I have also written this : I have left my life somewhere on a
table, and have forgotten it when I left – what a
thoughtlessness...
I am coming back there, guys.
More than 17 years after, I am coming
back.
I am coming back, by myself, a little Eastpack
on my back, nearly crying, emotion alive, terrified (of course !),
confident, standing, excited, ready for disappointment, for the
self-love recovered, and everything else that I am not expecting.
Chances not to find again precisely
what I have left behind unconsciously are pretty high, I know it ;
so I am counting on all I will harvest of "unexpected"
to pay off the deficit.
I am ready, guys.
I am on the road, moving, my heart is
beating so much, time goes by and urge to live is screaming.
I am afraid but I go for it, it is not
tomorrow, it is not yesterday anymore. My feet are on the road and
the road is rising to me. I was a bit prepared but... the shock is
real.
To live without armour after having
lived so much time with a very strong one is painful. The road
hurts. The wind is blowing. And life is calling...
Isabelle
And more...:
Ireland#1 - The earlier travel
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